LA PRATIQUE SPIRITUELLE DU PARDON

https://www.yoga-integral.fr/wp-content/uploads/2013/05/free.jpgLorsque Jésus-Christ était sur la croix, il priait Dieu pour ceux qui avaient voulu sa mort avec les mots: « Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font. »
On dit que Bouddha passait deux heures par jour à demander pardon dans son coeur à tous les êtres du monde.
Lorsqu’on a demandé au Dalai Lama quel avait été le moment le plus difficile qu’il avait vécu pendant sa persécution par les autorités chinoises, qui ont tué plus d’un million de tibétains, il a répondu que le plus dur avait été lorsqu’il était sur le point de perdre son état de compassion envers ceux qui persécutaient son peuple et lui-même.

Pourtant combien d’entre les hommes « modernes et civilisés » comprennent encore de telles attitudes? Combien d’entre nous sommes encore conscients de la valeur et de l’importance fondamentale de l’attitude qu’est le pardon? Le pardon est aujourd’hui considéré plutôt comme une faiblesse, et la plupart des gens croient que la résolution la plus efficace d’un préjudice qui leur a été infligé est la vengeance. Mais le plus souvent la vengeance attire en fait sur soi un conflit encore plus grand et cette escalade semble sans fin. Si l’on y regarde de plus près, il semble bien que cette difficulté à pardonner est devenue l’une des « maladies » les plus répandues dans notre société. Ceci est valable non seulement au sens figuré, mais également au sens propre, car, comme on peut le constater clairement du point de vue médical ou social, lorsque nous ne pardonnons pas, nous pouvons réellement en mourir, autant à travers les maladies corporelles que cela génère, que par une altération insidieuse mais dévastatrice de nos relations et du milieu dans lequel nous vivons.
https://www.yoga-integral.fr/wp-content/uploads/2013/05/genius_idea.jpgLe plus souvent, l’homme soi-disant « civilisé » de notre époque ne connaît plus la valeur profonde du pardon, avant tout parce que cette valeur n’est plus cultivée suffisamment dans notre éducation. Nous vivons dans un monde de compétition acerbe, de jugement critique et d’orgueil affiché à la vue de tous par les « puissants ». C’est pour cela que maintenant, peut-être plus que jamais, il est nécessaire de faire revivre la sagesse des traditions spirituelles authentiques qui disent que nous ne pourrons jamais accéder à un état d’équilibre, de bonheur et de paix (intérieure ou extérieure) sans que soient comprises préalablement les lois fondamentales de l’amour, du pardon, de l’humilité et de la non-violence. Ces valeurs éthiques et morales font partie des conditions essentielles à la vie dans toutes les traditions spirituelles humaines et c’est justement l’éloignement de ces valeurs fondamentales par la société actuelle qui nous a conduits à une situation très critique.
Les principes de la sagesse universelle affirment que le monde extérieur n’est qu’une réflexion de notre état intérieur. La science moderne (et particulièrement la physique quantique) est arrivée à la même conclusion en affirmant que l’univers est en fait un gigantesque hologramme – dans lequel les caractéristiques du tout sont parfaitement équivalentes et reproductibles dans chacune de ses parties – dont le substrat est la conscience. Pour cette raison, du point de vue spirituel, la responsabilité face aux événements auxquels nous sommes confrontés revient dans une très grande mesure à chacun d’entre nous, exactement par le fait d’assumer l’état intérieur avec lequel nous abordons la réalité. La voie spirituelle consiste pour chacun dans l’effort de se transformer consciemment soi-même, de se mettre en harmonie avec l’Univers et ses lois. Un précepte spirituel dit : « Si tu veux transformer le monde, commence par toi-même. » Malheureusement, peu de gens aujourd’hui se posent même le problème de la prise de conscience, de l’harmonisation et du contrôle de leurs propres états intérieurs. Le plus souvent, dans notre société, les repères essentiels de la vie se rapportent seulement aux aspects extérieurs, tandis que la prise de conscience des états intérieurs est, concrètement, presque complètement ignorée.
C’est justement à cause de ce manque d’éducation dans les principes spirituels que beaucoup d’entre nos semblables commettent encore et encore certaines erreurs d’attitude qui les conduisent inévitablement à la souffrance. Et l’un des principaux traits spirituels qu’il est essentiel que nous (ré)apprenions est la capacité à pardonner.
Il est significatif que beaucoup de gens portent dans leur âme des souffrances et des blessures qui résultent de fautes que d’autres ont commis par rapport à eux ou de fautes qu’ils ont commises eux-mêmes à un moment donné. Il y a des blessures qui persistent en dépit des années qui ont passé, des blessures qui marquent et rendent leurs vies tristes. Pourtant, ce qui est le plus douloureux est le fait qu’ils ne peuvent pardonner ce qu’on leur a fait ou bien ce qu’ils ont fait eux-mêmes, et c’est justement pour cela que leur souffrance s’éteint très difficilement. « Je voudrais pardonner mais je ne peux pas. », disent-ils. Il se crée ainsi une sorte de cercle vicieux dans lequel, bien qu’ils ne voudraient plus souffrir, ils ne peuvent accepter de passer au-delà de la cause qui leur apporte cette souffrance.
La perspective spirituelle sur cette situation est pourtant complètement différente. Elle affirme qu’en réalité le problème ne réside pas dans la faute elle-même (à laquelle nous nous attachons à l’infini), mais dans l’attitude avec laquelle nous abordons cette faute. Nous avons tous fait ou nous faisons encore certaines erreurs. C’est dans un certain sens inévitable. Concrètement, nous apprenons de nos erreurs, et de cette façon, tôt ou tard, nous prenons de la maturité grâce à  l’assimilation des leçons essentielles de la vie. Refuser à quelqu’un (y compris à nous-mêmes) le « droit » de se tromper, dénote pourtant un certain manque de perspective sur la nature de la vie, un certain blocage de notre vision sur le cours de l’existence. Rappelons-nous cet épisode biblique dans lequel, alors que les pharisiens voulait lapider la femme adultère, aveuglés par l’orgueil de leur supériorité imaginaire, Jésus-Christ a dit: « Que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre. »
Bien sûr, le pardon ne doit pas être compris de façon simpliste, comme étant une acceptation passive de toute dysharmonie. Bien entendu, le mal extérieur doit être arrêté, mais ce qui échappe souvent à la compréhension, c’est le fait que ce qui entretient et même amplifie un conflit, même mineur, est justement notre état intérieur – c’est-à dire notre attitude intérieure face à la situation qui a créé le conflit. « Lorsqu’on ne répond pas au mal par le mal, alors ce mal meurt dans le monde », disait Bouddha. Le pardon est d’abord une attitude intérieure à travers laquelle nous nous orientons d’une façon supérieure face à une situation qui nous affecte, avec l’objectif de l’harmoniser et de la transcender. Il est important de souligner que le pardon n’est pas une faveur accordée à la personne qui est pardonnée, le pardon est essentiel pour nous-mêmes. Bien que cela puisse être difficile à comprendre, ce ne sont pas les faits ou les personnes qui sont les plus importants mais l’attitude en soi : le fait de pouvoir pardonner à tous ceux qui nous ont offensé personnellement, et même à ceux qui ont fait des erreurs ayant affecté d’autes personnes et qu’on peut ne pas connaître directement. Parce qu’en réalité le Tout est Un, il n’existe pas de différence entre intérieur et extérieur, il n’existe pas de différence entre nous et le monde qui nous entoure. En effet, lorsque nous ne pouvons pas pardonner quelque chose, c’est bien nous qui tombons malade. La raison en est que l’insatisfaction et la rancune nous mettent en résonance avec les énergies de la colère et de la haine, elles les amplifient et les font s’accumuler dans notre être.
Si nous réfléchissons plus profondément, on s’apercevra que lorsque nous ne pouvons pas pardonner à quelqu’un, c’est que notre mode subjectif d’être n’a pas encore intégré cet aspect de la réalité, et par conséquent cela nous maintient dans un état de séparation et de division par rapport à notre propre nature essentielle, qui est pourtant de façon implicite connectée à la cohérence et à l’harmonie universelle. Nous ne pouvons pas être vraiment nous-mêmes si nous restons seulement des individualités séparées. Nous ne découvrirons notre nature réelle qu’à travers l’unité et la fusion de notre conscience avec le Tout.
Lorsque l’on comprend que nous sommes en essence un avec le monde, aimer le monde entier, en n’excluant aucun de ses aspects, devient l’équivalent de s’aimer soi-même. En réalité, rien ne se passe véritablement en dehors de nous,  mais seulement en nous.

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